Romuald Perrone, président des appellations Banyuls et Collioure, dresse un état des lieux lucide de ces vignobles du Roussillon, confrontés à une baisse des volumes et à un renouvellement générationnel délicat. En pleine redécouverte des subtilités climatiques et géographiques de la Côte Vermeille, le syndicat a engagé un vaste travail de hiérarchisation des vins pour répondre aux attentes actuelles et préparer l’avenir.
Romuald, vous êtes le président des appellations Banyuls et Collioure, comment vont-elles ?
Si l’on en juge uniquement par les courbes de production et de commercialisation, on ne peut pas dire qu’elles se portent très bien. Après, c’est aussi à l’image de tout le vignoble français. Toutefois, nous nous portons mieux que nos voisins d’Occitanie.
Pourquoi ?
Nous avons ici une base de vente directe qui représente 60 % de notre production. Il y a donc un effet amortisseur. Ces ventes locales représentent le matelas commercial du cru.
Constatez-vous une différence marquée dans l’évolution des deux appellations, Banyuls et Collioure ?
On ne distingue pas vraiment cette évolution, car on considère les deux appellations comme un ensemble : leur trajectoire reste similaire.
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Catégorie -L’interview de la semaine
Depuis 2009, Nadia Landry dirige une entreprise dédiée à la création et la préservation de murs en pierre sèche, un élément clé du paysage viticole de Banyuls-Collioure. Formée à l’économie sociale et solidaire, elle met son savoir-faire au service de leur restauration, face à l’abandon de ces ouvrages essentiels à ce vignoble. Dans cette interview, elle évoque les défis de leur préservation et les solutions nécessaires pour assurer leur avenir.
Nadia, comment vous êtes-vous retrouvée aux commandes d’une entreprise spécialisée dans la pierre sèche ?
À la création de mon entreprise en 2009, j’étais associé à André Pagès. André était formateur en pierre sèche. Personnellement, je n’avais pas le savoir-faire.
Quel a été votre cheminement pour occuper ces fonctions ?
Je me suis retrouvée professionnellement dans une association qui gère des chantiers d’insertion, dans ce domaine. C’est là où j’ai appris ce métier. Par ailleurs, en 2018, j’ai repris mes études pour être dirigeante d’entreprise de l’économie sociale et solidaire.
Dans le cadre de votre entreprise, vous vous êtes concentrée exclusivement sur le vignoble, ou aussi sur les particuliers ?
Nous sommes particulièrement centrés sur les pavillons qui ont besoin d’aménager leur jardin. Nous faisons des interventions dans les vignes, une fois par an. Malheureusement, les murettes ont été un peu laissées de côté.
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Installé depuis plus de vingt ans sur les hauteurs de Banyuls et Collioure, Bruno Duchêne cultive ses vignes en biodynamie sur ces terroirs aussi exigeants qu’escarpés. Autodidacte venu d’ailleurs, il revendique une approche libre et naturelle du vin, aux antipodes des normes imposées. Rencontre avec un vigneron déterminé, qui voit dans le bio le levier d’un avenir viable pour l’appellation.
Bruno, vous n’êtes pas natif du Roussillon ?
Non, je suis originaire du Loir-et-Cher. J’ai vécu en Bretagne, où je travaillais alors dans les champignons. J’ai ensuite vécu en Bourgogne, et j’ai fini par atterrir dans le coin.
Qu’est-ce qui vous a séduit sur ces terroirs ?
Tout ! Ce sont des paysages époustouflants et des lieux telluriques. Il y a aussi eu des rencontres humaines, comme celle avec Alain Castex, par exemple. C’est un pays de vignes, de gens, de vents, de terres et de mers, un endroit assez remarquable.
À quel moment avez-vous compris que ces terroirs pouvaient donner de grands vins ?
C’est avant tout une question de ressenti. Ici, les anciens, comme dans beaucoup de régions françaises, greffaient sur place. Mais chez nous, on plante ce qu’on appelle des plants américains, avec de beaux bois, que l’on reproduit nous-mêmes. Ce savoir-faire se perpétue encore un peu en Provence ou en Corse, mais ça reste assez rare. Chez nous, le matériel végétal est magnifique. Et surtout, les terroirs sont excellents.
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Fondé en 1984, le domaine de la Rectorie, dirigé aujourd’hui par Jean-Emmanuel Parcé, s’est fait connaître pour ses Banyuls Rimage et ses Collioure blancs. Avec 34 hectares de vignes, le domaine mise sur une réduction de ses surfaces, sur la transition bio et sur des pratiques novatrices pour faire face aux défis climatiques, tout en valorisant les spécificités de ses terroirs. Jean-Emmanuel, pouvez-vous nous présenter le domaine de la Rectorie ? C’est un domaine qui a été créé en 1984 par mon père Thierry et mon oncle Marc. Ils avaient sorti les vignes qui partaient à la cave coopérative. Ces vignes appartenaient à leur grand-mère. Ils voulaient produire leur propre vin et pas seulement apporter les raisins à la cave coopérative. Au départ, ils avaient 7 hectares, puis, petit à petit, ils se sont agrandis. Depuis 2010, je suis uniquement avec mon père. Quelle surface avez-vous aujourd’hui et comment votre domaine a-t-il été reconnu ? Nous sommes à 34 hectares. C’est très morcelé, il y a des micro-terroirs. Depuis 2013, je mets en avant des lieux-dits, avec des expositions vers la mer, qui ne souffrent pas de la sécheresse. Le domaine s’est fait connaître au début avec les Banyuls Rimage. Ça ne se faisait pas trop à l’époque, puisque la plupart des Banyuls étaient surtout des oxydatifs. Pouvez-vous nous rappeler ce que sont les « Rimage » ? Ce sont des Banuyls sur les fruits rouges sur la jeunesse. Les élevages sont assez courts, et les mises sont précoces avec seulement...
David Landron, vigneron installé en 2022 sur les Coteaux d’Ancenis, cultive 6 hectares de vignes bio sur l’ancien domaine familial à Ligné, à l’extrême nord de l’appellation. Passionné par la diversité des cépages, il mise sur des cuvées équilibrées et naturelles, entre Gamay, Pinot gris et Melon de Bourgogne. Avec son domaine « Passe Pont », il incarne son parcours de vie dans Sèvre-et-Maine et les Coteaux d’Ancenis, cherchant à tracer sa route en toute indépendance. David, vous êtes un nouveau visage sur les Coteaux d’Ancenis, quel est votre parcours ? Effectivement, je suis arrivé en 2022 sur les Coteaux d’Ancenis, je suis enfant de vigneron. J’ai fait des études en viticulture œnologie. Après une première installation dans Sèvre-et-Maine en 2017, avec un éleveur, un maraîcher, nous avons eu une mésentente. Nous nous sommes donc séparés fin 2021. Avez-vous voulu tracer votre propre, loin du domaine familial ? Oui, sur la première installation. Je voulais trouver une agriculture plus sociable. Mon nouveau domaine est basé sur l’ancien chai de mon père, à Ligné, au nord d’Ancenis. Pour autant, je suis indépendant du domaine Landron Chartier. Les vignes appartenaient donc à votre famille ? Oui, lorsque je me suis séparé d’avec mes associés, mon père et mon frère m’ont proposé de rependre 6 hectares de vignes. Ce sont des vignes qui sont en bio depuis 2013. Mon père les avait reprises à son arrivée en 2001. Crédit photo : M57.Studio Pour découvrir la suite de cette interview...
Vigneron installé sur les schistes des Coteaux d’Ancenis, du côté d’Oudon, Jacques Février cultive bien plus que la vigne : il cultive la liberté. Formé en sommellerie, puis passé par l’Alsace avant de revenir dans l’Ouest, il trace son propre sillon en dehors des cadres, assemblant des cépages, jouant des millésimes et explorant sans relâche. Entre expérimentations, météo capricieuse et engagement en bio, il raconte son parcours d’artisan du vivant, où chaque cuvée est d’abord une idée, et, souvent, un jeu. Jacques, comment vous êtes-vous retrouvé vigneron sur les terroirs des Coteaux d’Ancenis ? Avant toute chose, j’ai une formation en sommellerie. Dans le prolongement, j’ai aussi été attiré par le travail de la vigne, donc je me suis lancé dans une formation spécifique en Alsace, en 2011. Je suis originaire de Bretagne, donc, je souhaitais revenir dans l’ouest de la France. Après une première recherche dans le Muscadet et aussi en Anjou, les Coteaux d’Ancenis se sont présentés. J’y ai trouvé un potentiel pour avoir de jolis rouges à base de Gamay. En blanc, il y avait aussi le Pinot gris qui me rappelait un peu l’Alsace, puis le Melon de Bourgogne pour le Muscadet. Un domaine à taille humaine s’est présenté avec un lieu pour vinifier, ce qui n’est pas forcément facile à trouver, dans toute région viticole. C’est donc une reprise ? Le vigneron avant moi faisait du vin pour le négoce. Il récoltait ses raisins sur ses parcelles, puis les vinifiait et les vendait au...
Surplombant la Loire depuis l’un des plus beaux points de vue des Coteaux d’Ancenis, le Domaine des Génaudières cultive bien plus que de la vigne : une histoire familiale séculaire, un attachement profond à la terre, et une volonté affirmée de transmission. Entre patrimoine et innovation, passage au bio, et renaissance du Malvoisie, rencontre avec une famille de vignerons, à l’aube d’une nouvelle génération. Pierre-Yves, votre domaine est situé sur l’un des lieux les plus magiques des Coteaux d’Ancenis, mesurez-vous cette chance ? Oui, nous en sommes conscients ! Tous les matins, quand nous arrivons au travail, nous redécouvrons la vue. Elle change tous les jours selon la luminosité, selon le niveau d’eau de la Loire. C’est un écrin de verdure avec énormément d’arbres, d’oiseaux. Nous avons un cadre de travail très agréable. Est-ce qu’il y a des spécificités géologiques sur votre domaine ? Nous sommes à l’extrémité du Massif armoricain, notre zone s’appelle le verrou de la Loire. C’est l’endroit où la Loire est la plus resserrée entre ces deux rives, nous sommes sur une zone où les deux coteaux sont très proches. Cette géographie fait que nous avons une accélération de l’air qui arrive de l’ouest, qui donne une zone très ventilée, positive pour la vigne. Le Domaine des Génaudières est un domaine familial ? Effectivement, c’est un domaine familial. Anne et Brigitte, qui sont sœurs, l’ont repris il y a maintenant une quarantaine d’années. C’était déjà le domaine de leur père...
Installé depuis 2008 à La Varenne, au sud de la Loire, sur les coteaux d’Ancenis, Emmanuel Merceron a sensiblement fait évoluer la structure de son domaine. À la croisée des appellations du Pays nantais et de l’Anjou, il a fait le choix du bio et d’une viticulture plus artisanale. Réduction des surfaces, valorisation des vins, vinifications en évolution constante : son parcours est marqué par une adaptation aux nouveaux défis de son métier.
Emmanuel, pouvez-vous nous situer votre domaine ?
Le domaine est situé à La Varenne, l’une des neuf communes qui composent désormais Orée d’Anjou, sur la rive sud des coteaux d’Ancenis.
Votre domaine est à la croisée des chemins ou des appellations ?
C’est exactement ça ! De mémoire, nous pouvons ici produire jusqu’à neuf AOC ! Nous sommes à cheval sur les appellations du Pays nantais et celles de l’Anjou, et puis nous avons celle sur laquelle nous sommes situés : les coteaux d’Ancenis. Cela nous a longtemps donné un certain avantage et de très nombreuses possibilités : Cabernet d’Anjou, Rosé d’Anjou, Crémant de Loire, Muscadet, Muscadet coteaux de la Loire, coteaux d’Ancenis, ainsi qu’en IGP Val de Loire.
Y a-t-il aussi des inconvénients à pouvoir revendiquer toutes ces appellations ?
Je dirais que nous ne sommes pas au cœur des appellations. Nous sommes donc toujours un peu vus de loin par les autres.
Joanes Haritschelhar, enfant du pays d’Irouléguy, a repris les rênes du domaine familial après la retraite de sa mère, avec une vision claire : produire un vin respectueux de la nature. Si sa mère livrait jusque-là ses raisins à la cave coopérative, le jeune vigneron a, quant à lui, décidé de voler de ses propres ailes avec ses 3 hectares de vignes. Joanes, peut-on dire que vous êtes un enfant du cru ? J’ai grandi au sein de la ferme familiale. Mon père faisait du fromage de brebis, et ma mère l’aidait à la ferme. En 1995, un groupement foncier agricole a été créé dans le village d’Irouléguy. Cela a permis l’installation de cinq ou six vignerons, dont ma mère. Elle a donc eu l’opportunité de reprendre deux hectares de terres agricoles grâce à Lurzaindia. Pouvez-vous nous expliquer la nature de cet organisme ? C’est un organisme basque qui s’apparente à « Terres de Liens », présent partout en France. Il achète des terres, ce qui permet à de jeunes agriculteurs de s’installer plus facilement. Ma mère louait donc ces terres. Or, lorsqu’elle est partie en retraite, comme j’étais son fils, j’étais prioritaire pour les reprendre. Ces terres ne m’appartiennent pas, mais, étant fermier, j’ai un bail qui me garantit de pouvoir les utiliser, sans pouvoir les vendre. Cela signifie que ces terres sont sauvées de la spéculation foncière et qu’elles auront toujours une vocation agricole. Ma mère a donc planté deux hectares de vignes, et j’ai toujours baigné dans cet environnement. Votre...
Didier Ybargaray est un nouveau vigneron à Irouléguy. Un vigneron qui a fait le choix de se consacrer aux vins blancs. En plantant Petit et Gros Manseng sur une parcelle familiale, il mise sur la qualité et la simplicité. Pour lui, le blanc représente bien plus qu’une mode : c’est une évolution prometteuse pour l’appellation.
Didier, quel est votre parcours ?
Je n’ai pas suivi d’étude dans le vin. J’ai d’abord travaillé trois ans et demi en Vendée. Je suis parti à 20 ans et j’ai eu le mal du pays. Je suis donc revenu dans le coin. Mon oncle avait une ferme avec des brebis, mais je n’avais pas le goût de l’élevage. Toutefois, j’avais une forme de regret à ne pas avoir fait d’étude en viticulture qui ressortait de plus en plus. Mon goût pour le vin est arrivé avec le temps.
Vous vous êtes lancé sur une parcelle sans vignes ?
En effet, cette parcelle était à l’origine une prairie exploitée par plusieurs générations de ma famille. L’appellation étant fragmentée en îlots, savoir qu’une parcelle s’y trouve signifie généralement que l’exposition et la qualité du sol sont favorables. Le temps nous a donné raison, car la vigne s’y est parfaitement implantée, affichant une belle vigueur au fil des années.
À quand remontent les premières plantations ?
Nous avons planté un hectare en deux étapes, réparties sur deux années. À l’aube de notre aventure, nous avons choisi une approche progressive : une première partie a été plantée en 2021, suivie de la seconde en 2022.