Catégorie -L’interview de la semaine

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« On surnomme d’ailleurs les Côtes de Bourg la petite Suisse girondine »

Hugues, les vendanges viennent tout juste de s’achever : quel premier bilan dressez-vous pour les Côtes de Bourg ? Le bilan est plutôt positif. La climatologie nous a été favorable cette année ! Certes, les volumes resteront limités à cause de la sécheresse, mais la qualité sera bien au rendez-vous. Peut-on dire que c’est un millésime qui redonne le sourire aux vignerons ? Oui, tout à fait. Nous n’avons pas eu à subir une climatologie contraignante comme les années précédentes, et cela change beaucoup de choses pour le moral. Les Côtes de Bourg ne se résument pas à une appellation viticole. Pourquoi avoir décidé d’investir ans l’œnotourisme ? Nous sommes convaincus que notre territoire doit être reconnu non seulement pour ses vins, mais aussi pour tout ce qu’il offre au-delà. Notre histoire remonte au 2e siècle, lorsque les Romains ont investi Burgus. Bourg abrite aujourd’hui encore une magnifique citadelle classée, ouverte sur la Dordogne. Notre appellation se distingue également par la prédominance de propriétés familiales de taille modeste : ici, nul besoin de réserver pour visiter les domaines, la convivialité est immédiate. Enfin, nous bénéficions d’une situation géographique idéale : à seulement 30 km de Bordeaux. Enfin, l’ensemble de nos propriétés se concentre dans un rayon de dix kilomètres, ce qui rend la découverte particulièrement accessible. Quelle est, selon vous, la singularité de l’expérience proposée ici par rapport aux autres appellations bordelaises ? Pour...

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« Dans le vignoble nantais, certains terroirs dépassent la simple idée de communale »

De Château-Thébaud à Clisson, en passant par Clisson, Monnières Saint-Fiacre, ou Goulaine, Jérémie Huchet incarne une génération de vignerons du Muscadet attachée aux appellations communales. Entre héritage familial, expérience en Australie et volonté de redonner toute sa valeur au melon de Bourgogne, il défend un travail « cousu main » et dessine un autre avenir aux vins du pays nantais. Château-Thébaud est votre port d’attache. Pourtant, votre domaine s’étend aussi sur d’autres communes. Pouvez-vous nous dire ce qui vous a conduit à élargir ainsi vos horizons ?
 C’est la volonté de travailler sur différentes communales, afin de mettre en avant les terroirs du Muscadet. Avec de petits rendements, le cépage emblématique du vignoble, le melon de Bourgogne, révèle toute sa personnalité au contact des différentes roches mères. Cette approche pluricommunale n’allait pas de soi dans le Muscadet. À quel moment avez-vous pris ce virage, et qu’espériez-vous y trouver ?
 Avant de m’installer dans le Pays nantais, j’ai travaillé en Australie, dans une approche industrielle du vin. Lorsque je suis revenu, j’ai découvert qu’ici, on privilégie bien plus volontiers le cousu main. Derrière ce choix, il y a sans doute eu des étapes marquantes, peut-être même des obstacles. Quels souvenirs gardez-vous de ce cheminement ?
 Le vrai défi, c’était de redonner de la valeur à des vins longtemps sous-valorisés. Parmi ces terroirs, Goulaine occupe une place à part ? Effectivement, sur les terroirs...

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« Avec mon frère, nous arrivons aujourd’hui au dénouement : la reconnaisse officielle de la Haye-Fouassière ! »

Quatrième génération de vignerons, Sarah et Charly Bideau ont repris en 2023 le domaine familial devenu Bidgi. À La Haye-Fouassière, ils prolongent le travail engagé par leurs parents et ouvrent une nouvelle page, portée par le bio, le label Terra Vitis et la récente reconnaissance de l’appellation communale. Sarah, Bidgi, c’est un nom de domaine singulier : pourquoi ce choix ? Ce nom raconte l’histoire du domaine et de nos deux familles. Avec mon frère Charly, nous avons repris le domaine familial en janvier 2023 : nous représentons la quatrième génération. Il a été fondé par nos arrière-grands-parents. Deux familles de vignerons en étaient à l’origine : la famille Bidaud et la famille Giraud. Nos parents se sont associés et ont créé le domaine Bidaud-Giraud, devenu aujourd’hui Bidgi ! Vous revendiquez plusieurs pratiques – Terra Vitis, agriculture biologique, biodynamie. Laquelle considérez-vous comme la plus essentielle ? Effectivement, l’intégralité de notre domaine est labellisée. La moitié est en Terra Vitis, l’autre moitié en bio. On met aussi en place certaines pratiques qui vont dans le sens de la biodynamie. Pour nous, ces deux labels sont complémentaires et essentiels à la préservation de l’environnement. Le bio, c’est évidemment le fait de n’utiliser que des produits naturels. Terra Vitis, c’est une approche plus globale : cela prend en compte la gestion de l’eau, d’électricité, l’empreinte carbone. Quel est la taille de votre domaine ? Au total, ça représente...

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« L’enjeu de la communale Le Pallet sera sans doute de voir davantage de domaines indépendants la proposer »

Moins connue que ses voisines Clisson ou Gorges, la communale Le Pallet peine encore à s’imposer dans le paysage du Muscadet. Pour François Ménard, jeune vigneron revenu au pays, l’enjeu des prochaines années sera que davantage de domaines indépendants s’approprient ce terroir singulier et contribuent à en révéler le potentiel. François, vous sortez tout juste des vendanges. Comment se sont-elles passées dans le Muscadet ? Très bien ! Cela faisait bien longtemps que nous n’avions pas eu un tel millésime ! C’est du bonheur, les vignerons sont heureux ! Cette année, nous avons vendangé tôt tout en conservant de l’acidité. Nous sommes sur un millésime très qualitatif avec de beaux équilibres et, qui plus est, avec de très bons rendements. Ce millésime redonne le moral ? Nous ne l’avions pas perdu, mais il redonne de l’énergie, ce qui permet de repartir sur une belle dynamique. Quelle est l’histoire de votre domaine ? Avant tout, c’est un domaine familial. Nous avons des vignes autour du Moulin de la Minière depuis 1734. Nous avons 39 hectares de vignes en production. L’intégralité du domaine est certifiée bio depuis 2020. Vous êtes nombreux à y travailler ? Nous sommes dix à plein temps. C’est le minimum ! Personnellement, quel a été votre cheminement ? Je n’ai pas suivi un parcours « classique ». Après une école de commerce à La Roche-sur-Yon, mes études m’ont conduit à voyager à l’étranger, notamment en Irlande et au Panama. C’est finalement sur le tard que j’ai découvert le...

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« Nous avons une diversité sous-estimée dans le Muscadet ! »

Depuis 2002, Romain Maillet est ingénieur au sein du syndicat des vins du Muscadet. En charge des dossiers techniques et directement des futures Communales, il accompagne les vignerons dans la mise en place et la structuration de cette nouvelle approche. Romain, lors de votre arrivée en 2002, où en était le Muscadet par rapport aux Communales  ? En 2002, nous étions encore dans la genèse ! Il faut savoir que, dès les années 90, un grand travail de dégustation avait été effectué chez les vignerons pour identifier des cuvées spécifiques issues de sélections parcellaires avec des élevages longs. Cela sortait radicalement de l’image du Muscadet sur lie. Une grande étude avait également été menée par l’IFV. Elle avait démontré la grande diversité de nos terroirs. Une autre étude, menée par l’INRA cette fois, avait permis de mettre en avant le caractère non variétal du cépage du Muscadet : le melon de Bourgogne. Un cépage qui a des précurseurs d’arômes susceptibles de révéler une richesse et une complexité dans le temps. Il y a donc eu une conscientisation qu’il y avait non pas, « un », mais « des » Muscadets. Tout était acté à mon arrivée au niveau du syndicat pour aller vers une hiérarchisation de type « communal », comme tout était engagé avec l’INAO. Un premier cahier des charges était déjà en cours avec des premiers essais chez certains vignerons. Avait-on alors une connaissance des terroirs précise  ?  Nous n’avions pas une connaissance précise à l’époque. En revanche, nous...

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« J’ai assez rapidement associé le cépage piquepoul à un personnage »

Longtemps à la tête du magazine Terre de Vins, Marc Médevielle s’exprime aujourd’hui loin des rédactions. En 2018, il s’est plongé dans le vignoble de Picpoul de Pinet pour écrire Picpoul de Pinet, une odyssée viticole en Languedoc (Éditions de La Martinière). Il nous livre ici son regard sensible et littéraire sur l’appellation… et sur son cépage emblématique. Marc Médevielle, quel a été votre cheminement pour écrire un livre sur Picpoul de Pinet ? À travers mes activités professionnelles passées, je connaissais le président de l’appellation. Il m’a proposé de travailler sur son histoire. J’étais un peu hésitant au début. Ce qui m’a décidé, c’est que cette appellation est singulière en Languedoc ! Si l’on fait abstraction des muscats, c’est la seule dont le nom fait référence à un cépage — un cépage autochtone produit depuis le 14e siècle ! Par ailleurs, cette appellation est monocépage, ce qui est peu commun dans une région plutôt connue pour faire des vins d’assemblages. J’avais envie de comprendre comment ce cépage avait résisté à l’usure du temps et comment il avait pu affirmer une personnalité aussi singulière. Quelles ont été vos principales découvertes ? Pour bien comprendre, il y a eu un raz-de-marée viticole sur le Languedoc au 19e siècle, mais avant la Révolution, les bordures de l’étang de Thau étaient déjà complètement sous l’emprise de la viticulture. Les terroirs de Picpoul de Pinet ont précédé ce mouvement, d’une certaine façon. Cela s’explique par la...

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« Les cépages résistants ? Il va y avoir un grand “boom” d’ici quatre à cinq ans ! »

Cédric Arnaud est à la tête du domaine Villa Noria depuis six ans. Au-delà du cépage piquepoul, emblématique de l’appellation, il a fait le pari des cépages résistants : floréal, monarch, artaban, muscaris ou encore souvignier gris. Il nous partage les raisons de ces choix et les perspectives qu’ils ouvrent selon lui.
Pourquoi avez-vous décidé d’utiliser des cépages résistants sur votre domaine ?

Il y a trois ans, un épisode particulièrement virulent de mildiou a ravagé nos vignes, anéantissant 80 % de notre récolte. L’année suivante, ce sont tous nos merlots qui n’ont pu être vendangés. À notre échelle, une telle perte représente plusieurs centaines de milliers d’euros. Une hémorragie à laquelle il fallait mettre un terme. Il devenait urgent d’agir, de trouver une réponse à la hauteur du défi.
Comment avez-vous eu connaissance de l’existence de ces cépages résistants ?
Nous suivions de près l’expérience d’un domaine qui s’était engagé dans cette voie. Malheureusement, à l’époque, la législation ne leur permettait pas encore de commercialiser leurs vins issus de ces cépages. Mais l’idée avait fait son chemin.
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« L’image du Picpoul de Pinet reste aujourd’hui largement liée à la grande distribution »

À contre-courant de cette logique, Olivier Azan mène une tout autre voie. À la tête d’un domaine familial, le Petit Roubié, il défend depuis 1985 une viticulture en agriculture biologique, bien avant que cela ne devienne une tendance. En véritable artisan du vin, il incarne une vision plus exigeante et engagée de l’appellation, loin des standards industriels. Vous êtes l’un des rares vignerons en cave particulière à Pinet. Pourquoi ce choix ? Je me suis installé ici en 1982. Et dès 1985, j’ai fait le choix du bio. À l’époque, c’était marginal, on me regardait comme un original. Mais pour moi, ça coulait de source. J’avais vu ce que donnait l’arboriculture conventionnelle en matière de traitements, et je ne voulais pas de ça. Alors j’ai planté de la vigne, et je me suis lancé en cave particulière, à contre-courant. Le piquepoul n’était pas vraiment un cépage phare à l’époque… Non, à l’époque, il servait surtout pour les vermouths, comme le Noilly-Prat. On ne le vinifiait pas vraiment pour lui-même. C’est un cépage qui a longtemps été sous-estimé, mais il a une vraie originalité : de la fraîcheur, une belle acidité naturelle, et surtout une identité forte. Aujourd’hui, on commence seulement à en mesurer le potentiel. Le bio sur piquepoul, ce n’est pas trop compliqué ?  C’est un cépage capricieux. Les grappes sont serrées, sensibles à l’oïdium. En bio, il faut être très vigilant : effeuiller, aérer, traiter tôt. C’est du travail. Mais c’est faisable, à condition d’être bien...

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« Historiquement, on faisait plus de rouges que de blancs à Châtillon-en-Diois ! »

Au cœur des coteaux d’altitude du Châtillon-en-Diois, Zoé Cayol nous livre la vision du domaine familial enraciné dans une appellation singulière. Depuis 1992, le domaine de Maupas est porté par une viticulture bio engagée et un équilibre subtil entre tradition et modernité. Rencontre avec une jeune vigneronne qui écrit son histoire, loin des sentiers battus du Diois. Zoé, votre domaine est situé sur l’appellation de Châtillon-en-Diois, pouvez-vous nous la présenter ?  C’est une appellation d’altitude. Nous avons ici des coteaux entre 500 et 700 mètres d’altitude pour les plus hauts. C’est un vignoble qui se niche dans les contreforts du Vercors. L’aire d’appellation compte 76 hectares, mais aujourd’hui, il en reste une petite trentaine de plantés. L’appellation est-elle portée par un mouvement d’extension continue, ou ses contours sont-ils figés depuis déjà quelque temps ? En 1992, quand mon père a défriché une dizaine d’hectares, c’était quand même une appellation en perte de vitesse. Aujourd’hui, pas mal de surfaces ont été plantées pour la Clairette de Die, au détriment des rouges de Châtillon. Historiquement, on faisait plus de rouges que de blancs ici. C’est une terre de rouge, mais aussi une terre de blancs ! La particularité de l’appellation, c’est qu’elle permet l’élaboration des trois couleurs, n’est-ce pas ?  Oui, rouge, blanc et rosé ! En ce qui concerne les cépages, le Gamay tient le rôle principal. À ses côtés, on retrouve également la Syrah et le Pinot noir...

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« Je fais surtout des vins blancs secs dans une approche naturelle »

Installé récemment dans le Diois après une première vie viticole dans le pays nantais, Manuel Pineau a choisi de tout recommencer par amour et par conviction. Ce vigneron, adepte des vins blancs secs, s’inscrit dans une bio et naturelle. Sans produire de Clairette de Die, il revendique une approche artisanale et engagée, avec l’ambition de faire émerger une nouvelle lecture des terroirs diois. Manuel, vous n’êtes pas du tout natif du Diois, puisque vous avez même eu un domaine dans le Pays nantais. Comment vous êtes-vous retrouvé sur ce vignoble ? Ce sont les aléas de la vie ! J’ai tout simplement rejoint ma compagne, qui habitait dans le Diois. Même si je travaille seul, nous avons fait le choix de transférer l’entreprise que j’avais dans le Pays nantais. Elle travaille à la chambre d’agriculture et connaît bien les principaux acteurs du monde agricole. Assez rapidement, j’ai donc été mis en contact avec un collègue qui m’a proposé de reprendre 3 hectares, comme dans le Pays nantais. Quel est votre parcours, avant cette installation dans le Diois ? Je suis né à Nantes. J’ai fait un BTS viticulture-œnologie en alternance en 2004, dans le Muscadet. Ensuite, j’ai travaillé dans différents secteurs du monde du vin : chambre d’agriculture, vente, puis, en 2015, j’ai repris des vignes tout en travaillant sur le domaine Bonnet-Huteau. À partir de 2021, j’ai diminué mon temps sur ce domaine pour me consacrer davantage au mien. C’était une forme d’aboutissement : faire mon propre...